Corps libres, cœurs dansants : dans les coulisses du Bal arrangé

Reportage

Mise à jour le 13/06/2025

Sarah, lors de la répétition du bal arrangé, au foyer de vie, la Maison de Pénélope.
Le 5 juillet prochain, le Bal arrangé clora le Mois parisien du handicap dans un tourbillon de musique, de couleurs et de gestes partagés. En amont, des ateliers permettent de se préparer à cette fête rassembleuse. Plongée dans l’un de ces rendez-vous joyeusement chorégraphiés, où chacun danse à sa façon, sans jamais être laissé de côté.
« Bonjour ! Tu t’appelles comment ? » Le sourire ancré, la poignée de main franche, Éric est planté en haut de l’escalier par lequel on accède au foyer de la Maison de Pénélope (15e). Il est l’un des pensionnaires de l’association Les Jours Heureux, structure qui reçoit des personnes en situation de handicap mental. Et aujourd’hui, c’est une journée un peu spéciale dans le centre : une vingtaine de personnes sont rassemblées dans le hall, transformé en salle de danse pour l’occasion, car elles vont participer au premier atelier préparatoire au Bal arrangé.
Le Bal arrangé, c’est une fête chorégraphiée, inclusive, accessible à tous les corps, à toutes les histoires, à toutes les vitesses. Et c’est aussi, pour beaucoup, un rendez-vous vital, qui fait place aux corps empêchés ou marginalisés, mais sans les isoler. Organisé depuis 2019 en clôture du Mois parisien du handicap, il marque également l’ouverture de Paris Plages. Cette année, il s’habillera aux couleurs du Brésil : vert, jaune, sonorités percussives et énergie solaire.
Envie de vous joindre à la fête ? C’est encore possible !
Et c’est ouvert à toutes et à tous. Il suffit de participer à un atelier préparatoire et à la répétition générale le 4 juillet. Retrouvez le planning sur Instagram.

Un projet né dans les couloirs d’un hôpital

Derrière cette utopie dansante, il y a Johan Amselem, chorégraphe, fondateur de la compagnie La Halte Garderie. Clubbeur assumé, il a longtemps fait danser les foules en club avant de déplacer la fête vers l’espace public et les lieux de soins. En 2009, il propose son tout premier atelier à l’hôpital Robert-Debré (19e), auprès d’adolescents atteints de troubles du spectre autistique.

Ma sœur est éducatrice spécialisée. Elle m’avait dit : "Fais comme eux. Entre dans leur manière de voir le monde."

Johan Amselem
chorégraphe, fondateur de la compagnie La Halte Garderie
Le professeur de danse Yohan Amselem lors de la répétition du bal arrangé, au foyer de vie, la Maison de Pénélope.
Il applique ce conseil à la lettre : il écoute, observe, imite. C’est la naissance d’une méthode : une danse de l’adaptation, de l’écoute radicale, essence même du Bal arrangé. Le principe est simple, tout le monde peut participer. Il suffit d’un atelier préparatoire et d’une répétition générale pour devenir « complice ». Sinon, on peut aussi venir le jour J et se laisser guider. En 2024, plus de 1 000 personnes ont dansé !
Le bal arrangé : un événement inclusif à Paris
bassin de la villette - bassin de la villette , Paris 19e
Du samedi 05 juillet 2025

Une 6e édition très attendue

Retour sur l’atelier d’aujourd’hui, où le petit groupe se prépare. Johan est accompagné de Dorothée, chorégraphe qui propose une danse signée, inspirée de la Langue des signes française (LSF). Autour d’eux, des personnes aux corps très divers, certaines en fauteuil, toutes impatientes de danser.

Le Bal arrangé, c’est un moment de débordement joyeux. Pour les participants, c’est une visibilité précieuse. Ils savent qu’ils font partie d’une œuvre. Et ils le savourent.

Johan Amselem
chorégraphe, fondateur de la compagnie La Halte Garderie
L’échauffement en cercle débute, sur un morceau de Beyoncé. On commence par des grimaces pour réveiller le visage, puis on active les articulations, on sautille, on roule des hanches. Très vite, la musique brésilienne embarque tout le monde dans un tempo enjoué.
Johan déroule la séance comme une montée en puissance, avec des séquences pensées pour mettre en mouvement chacun. La danse articulaire mobilise les poignets, les coudes, les genoux… tout ce qui plie et relie. Puis vient la danse des bras, essentielle pour celles et pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer debout. La danse miroir suit, plus lente, plus intime : un jeu de regard, d’imitation et d’écoute mutuelle. Dorothée, elle, propose une danse signée, où le geste devient parole. Entre base classique, voguing, hip-hop, smurf et improvisation libre, le vocabulaire de chaque séquence est hybride.
À mesure que les éditions passent, les visages deviennent familiers. « Certains sont là depuis le début. On a créé du lien, on revient dans les structures chaque année, on est attendus. » Et les nouveaux venus, eux, sont toujours accueillis avec chaleur.
La séance se termine, on se donne rendez-vous pour une deuxième répétition la semaine prochaine. Marie-Odile s’avance, rayonnante. « Je n’ai pas envie de tomber à l’eau ! » plaisante-t-elle, en pensant au grand final sur les quais du canal Saint-Martin (19e). Elle est là pour la troisième fois, fidèle, investie, et se projette déjà au 5 juillet : « Pour le bal, je pourrais mettre une robe ? »
Default Confirmation Text
Settings Text Html