À la Maison des réfugiés, « on récolte, on partage, on apprend »

Reportage

Mise à jour le 20/06/2025

Deux personnes en train de modeler un insecte en argile lors de l'atelier céramique à la Maison des réfugiés.
Rue Henri-Ribière (19e), un ancien lycée reconverti accueille chaque jour celles et ceux qui ont fui leur pays, et aussi tous ceux qui souhaitent découvrir ce lieu atypique et multi-usage. Ateliers de jardinage ou de musique, de yoga ou de sculpture, cours de français ou d'anglais, orientation, accompagnement, espaces de rencontres… Bienvenue à la Maison des réfugiés, lieu où solidarité et hospitalité font loi.
Derrière la façade discrète de la Maison des réfugiés se vit l’une des expériences les plus singulières d’hospitalité urbaine à Paris. En ces lieux se croisent celles et ceux qui ont tout quitté, mais aussi des habitants du quartier, des associations engagées, des bénévoles, des étudiants, des voisins intrigués par ce nouvel espace…
Dès l’entrée, le contraste avec l'extérieur est saisissant. Une grande salle lumineuse, des murs habillés de drapeaux, un comptoir d’accueil en bois clair où l’on peut poser une question, ou juste demander un café. Quelques tables disposées sur la gauche donnent une ambiance de bistrot de quartier. Là un homme écoute de la musique, ici une mère prend du temps pour elle, et cette retraitée qui cherche… à signer une pétition ! Quelle que soit la raison de leur présence, les visiteurs se sentent un peu comme chez eux, à la Maison des réfugiés.

Oreille absolue, mains vertes et corps apaisés

Au rez-de-chaussée, un cours de yoga vient de commencer. Non loin de là, à l'atelier sculpture, on modèle la terre silencieusement. Un calme seulement troublé par Ketia. Ce Franco-Japonais de 19 ans est assis au piano quart de queue qui trône dans un coin, l’air aussi paisible que les notes qu’il égrène. Il joue du Armstrong… à sa façon. Le jeune prodige a l’oreille absolue.

La première fois, je suis venu pour un atelier nature et musique. Et j’ai vu ce piano. C’est le même modèle que celui sur lequel je jouais avant. Depuis, je reviens tout le temps.

Keita, 19 ans
joueur de piano depuis 11 ans
Plus bas, sur la terrasse, trois rangées de bacs de culture tracent des lignes vertes dans le béton. L’association Paysan Urbain s’en occupe deux fois par semaine. Des pois, des herbes aromatiques, des salades, des tomates bientôt, et tout est bio, cultivé avec soin. « On apprend les gestes, on récolte, on discute, on partage. L’autre jour, quelqu’un a préparé un taboulé avec les fèves, et en a ramené pour tout le monde », raconte Maëlys, animatrice de l’atelier. Jenny, la soixantaine et un accent d’outre-Atlantique, vient chaque mercredi. Elle n’a pas de jardin, alors ici, elle met les mains dans la terre, son petit rituel hebdomadaire.
Habib, écouteur à l'oreille, récolte les cosses brunes de petit-pois pendant qu'Asma, jet d’eau en main et chapeau sur la tête, arrose avec énergie. Ils sont venus ensemble, après avoir découvert la Maison… sur TikTok. Depuis, ils participent aux ateliers de jardinage, mais aussi à la couture, à la danse, aux cours d’anglais. « Ça remplit nos journées, ça les rend utiles. » Le planning, où toutes ces activités sont gratuites, est mis en ligne tous les débuts de mois.

Reprendre pied, à son rythme

Salomé, 19 ans, est en stage ici. Accueil, animation, orientation, la jeune fille enchaîne les missions : « C’est un lieu très vivant. On fait mille choses, toujours avec bienveillance. Je me sens presque en famille. » Plus loin, Thoeiba sillonne l’espace avec une aisance tranquille. Arrivée en mars, elle est l'une des dernières recrues de l’équipe.
Auxiliaire socio-éducative, elle a le sens du lien dans le sang. Un mot ici, un geste là, elle tisse une présence. Ancienne médecin dans un pays lointain, elle connaît les parcours cabossés, les galères de la vie, par exemple pour trouver un logement quand on n'a pas de CDI. Elle et ses collègues permettent aux gens de reprendre pied, à leur rythme.

Si quelqu’un a un problème, on va essayer de l’aider, mais on va aussi lui proposer de participer aux activités pour lui changer les idées.

Thoeiba
Auxiliaire socio-éducative

Une forme de réparation

À l’étage, un espace coworking et diverses pièces servent de lieu de rendez-vous et de bureaux utilisés par les associations et les partenaires pour venir en aide aux réfugiés et aux gens dans le besoin. La lumière inonde les petites salles dédiées aux cours, qui donnent sur le parvis. Dans l’une d’entre elles, flambant neuf, un tableau tactile habille un mur. On est ici dans le territoire de Valérie, formatrice en français pour adultes avec Emmaüs Solidarité.

Quand on n’a pas de chez-soi, être accueilli dans un lieu qui donne envie de rester, c’est déjà une forme de réparation.

Valérie
formatrice en français
Autour de la grande table, Hassan, un jeune Syrien, apprend notre langue depuis quelques mois. Amateur de foot, il s’exprime déjà très bien. À côté, Shaidoul, qui vient du Bangladesh, est en stage de seconde avec l’association. Les participants aux cours font parfois des kilomètres pour venir ici. « Ils me disent souvent qu’ils sont honorés d’être dans un lieu aussi beau, confie Valérie. C’est important. Quand on n’a pas de chez-soi, être accueilli dans un lieu qui donne envie de rester, c’est déjà une forme de réparation. »
Journée mondiale des Réfugiés le 20 juin
À l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, la Ville de Paris, le HCR, Emmaüs Solidarité, SINGA, la mairie du 19e, la Médiathèque James Baldwin et la Maison des réfugiés vous invitent à une journée festive, engagée et inclusive, le vendredi 20 juin 2025.

Tout le programme à retrouver ici !
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