Lutter contre le harcèlement à l’école : comment l’anticiper et le repérer ?

Interview

Mise à jour le 03/11/2025

Portrait en extérieur de Laurie Belleterre, Coordinatrice des Moyens de Fonctionnement CASPE 7/15e
La Journée nationale de lutte contre le harcèlement à l’école est de retour le 6 novembre. Pour y voir plus clair avec ce phénomène insidieux, découvrez l’interview de Laurie Belleterre, coordinatrice à la circonscription des affaires scolaires et de la petite enfance 7/15 et référente du dispositif de lutte contre les violences et le harcèlement à l’école.

Comment définissez-vous le harcèlement à l’école ?

Le harcèlement, ce sont des violences répétées. Le mot « répétition » est essentiel, car il marque la différence avec un simple conflit. C’est une dynamique qui s’installe, souvent de manière insidieuse. Autrefois, ces violences s’arrêtaient à la porte de l’école, même après le temps scolaire. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux et les discussions en ligne, elles se prolongent jusque dans la sphère privée, ne laissant plus de répit aux enfants, même chez eux.
Plusieurs protagonistes sont impliqués : le harceleur – souvent en détresse lui-même –, le harcelé et le témoin, dont l’action peut briser la dynamique du harcèlement. Il est essentiel de sensibiliser les enfants – et les adultes qui les côtoient – à ces trois rôles, afin qu’ils sachent reconnaître les situations et réagir en conséquence.

Justement, face à ce type de situations, de quelle manière accompagnez-vous les équipes et les enfants ?

Nous travaillons principalement sur la prévention et la sensibilisation. L’idée, c’est d’anticiper, car des situations de violence existent partout, même si on ne les qualifie pas toujours de harcèlements. Jeux de rôle, débats et même des escape games immersifs, etc. : nous utilisons des outils ludiques dans les écoles et les collèges. Les enfants doivent y repérer des situations de violence et proposer des solutions collectives. C’est une manière concrète de libérer la parole.
Pour les plus petits, nous abordons le sujet par les émotions : apprendre à identifier ce qu’ils ressentent et à poser des mots dessus. C’est une étape essentielle pour construire la confiance en soi.

Entre adultes, il est important de faire attention à nos comportements pour donner le bon exemple.

Laurie Belleterre
coordinatrice des moyens de fonctionnement
Aussi, les animateurs et les directeurs sont formés à recueillir, à transmettre et à traiter la parole des enfants : ils ne sont pas psychologues, mais des relais. Le plus difficile, c’est quand un jeune confie quelque chose « sous secret ». Dans ces cas-là, il faut avoir conscience que protéger, ce n’est pas garder le silence, c’est transmettre la parole à ceux qui peuvent agir.

Quels sont les signes devant alerter les parents ?

L’observation et l’écoute sont les deux piliers. Il faut éviter d’interpréter trop vite ce que dit ou fait un enfant, et plutôt poser des questions, creuser, s’intéresser sincèrement. Le harcèlement n’est pas toujours visible : un enfant peut être intégré dans un groupe tout en étant la cible de micro-violences quotidiennes. L’isolement n’est donc pas le seul indicateur. Parfois, les enfants ne parlent pas, par honte ou peur de trahir un secret.

D’où l’importance d’instaurer une relation de confiance, sans jugement, et de savoir recueillir la parole plutôt que de chercher immédiatement à résoudre.

Laurie Belleterre
coordinatrice des moyens de fonctionnement
Il faut aussi parler du cyberharcèlement : les parents ont aujourd’hui un rôle essentiel dans l’accompagnement numérique de leurs enfants. Le harcèlement ne s’arrête plus à la porte de l’école et il se poursuit parfois sur les réseaux sociaux, les messageries et même les jeux en ligne, où les échanges peuvent devenir violents sans que les adultes en aient conscience.
Il ne s’agit pas d’espionner, mais de surveiller avec bienveillance. Installer un cadre clair, discuter des règles d’usage, et rappeler qu’Internet garde des traces : ce sont des réflexes indispensables. Les parents peuvent demander à voir avec qui l’enfant joue, quels outils il utilise pour communiquer, et vérifier les paramètres de confidentialité.

Comment peut-on mieux prévenir le harcèlement à l’école ?

Il faut travailler sur la confiance en soi. C’est le cœur du problème, aussi bien pour la victime que pour le harceleur ou le témoin. Un enfant sûr de lui saura dire non, alerter ou se défendre avec calme.
La prévention passe aussi par le rythme : savoir ralentir. Dans nos écoles, tout va vite, on multiplie les activités, les sorties, et on oublie parfois les moments informels d’écoute. Ces temps calmes, ces discussions à la cantine ou dans la cour sont souvent les plus précieux. C’est là que les enfants se livrent. C’est aussi à ces moments que l’on peut détecter les signaux faibles : de petits indices, parfois discrets, qui peuvent révéler un mal-être ou une difficulté chez un enfant. Les repérer tôt permet d’agir avant que la situation ne s’aggrave.
Finalement, lutter contre le harcèlement, ce n’est pas seulement réagir à la violence : c’est bâtir une culture de la bienveillance, de la parole et du respect mutuel.
Pour aller plus loin à la maison
Stop la violence est un jeu en ligne gratuit qui aide les collégiens et lycéens à comprendre et à prévenir le harcèlement à l’école. Créé par Tralalere avec le soutien du ministère de l’Éducation nationale, il permet aux jeunes, à travers des enquêtes interactives, d’apprendre à reconnaître, à comprendre et à agir face à la violence. Un outil simple et sûr pour dialoguer en famille sur ces sujets essentiels.

> Découvrir les enquêtes en ligne